Assureurs et assurés : l’impossible conte de fée ?

23 juin 2022  | Par Jessica BERTHEREAU
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Opaque, sans empathie…l’assurance revêt une image peu reluisante. Existe-t-il des raisons tangibles pour expliquer ce désamour ? Le secteur en tire-t-il avantage ? Et est-il condamné à être incompris ? Débat.

La rencontre entre assureurs et assurés a-t-elle jamais eu lieu ? Alors que l’assurance moderne naît en France au XIVe siècle de la nécessité de sécuriser les longs périples maritimes, cette innovation bourgeoise « apparaît comme un moyen d’anticiper les coups du sort. C’est une brèche dans la toute puissance royale, un premier pas vers l’individualisme », relate Claire Bellanger dans sa thèse « Histoire de l’assurance de dommages en France » (1). Toutefois, cette vision est loin d’être partagée par les révolutionnaires, qui perçoivent au contraire l’assurance comme « inutile, au pire dangereuse, car immorale. Elle pouvait selon eux pousser les propriétaires à la négligence puisqu’ils étaient certains d’être indemnisés de leur préjudice et pire encore, les inciter à des incendies volontaires pour toucher une indemnité conséquente ». En 1793, les membres de la Convention votent ainsi un décret interdisant les compagnies financières, dont les compagnies d’assurance, qui réapparaitront sous la Restauration et connaîtront leur plein développement au milieu du XIXe siècle. L’image déjà écornée de l’assurance apparaît aussi dans la littérature, à l’instar de La Comédie humaine, œuvre dans laquelle Balzac dépeint Félix Gaudissart en vendeur d’assurance caricatural prêt à tout…

Aujourd’hui encore, l’ambivalence domine : alors que l’assurance est obligatoire, les Français la considèrent comme « sécurisante », « rassurante » et « indispensable », mais aussi « complexe », « opaque » et « floue ». Ils utilisent d’ailleurs deux fois plus de qualificatifs négatifs que positifs pour qualifier le secteur (2). Tandis que la crise sanitaire liée au Covid-19 a remis sur le devant de la scène la mauvaise image du métier, les causes profondes de ce désamour interrogent.

« Comme toute profession technique, l’assurance est dans sa bulle et ne fait pas d’effort particulier pour se faire comprendre. C’est le cas d’autres secteurs d’activité, mais pendant la crise, alors que tous les restaurateurs avaient la même problématique, c’est devenu flagrant», se souvient Valéria Faure-Muntian, députée LREM chargée de l’assurance pendant la législature 2017-2022. Les assureurs ont ainsi dû affronter l’incompréhension, puis les attaques en justice de nombreux restaurateurs. Et ce, même si très peu de contrats relatifs aux pertes d’exploitation couvraient explicitement le risque de pandémie : 2,6 % exactement selon l’Autorité de contrôle prudentiel et de régulation (ACPR), tandis que 4,1 % étaient dans une zone grise (3).

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