– Décembre 2053 –
Victimes du réchauffement climatique et des activités anthropiques, les mers et océans ont vu leur température augmenter au même rythme qu’ils étaient en proie à une pollution exponentielle. Résultat : ils sont aujourd’hui totalement asphyxiés. Amputée d’un de ses deux poumons et malade de l’autre, la population tente de survivre.
Le Guilvinec, Finistère, 31 décembre 2053
Alors qu’il longe le quai le long duquel, autrefois, s’abritaient les bateaux du port de pêche du Guilvinec, Tangi Le Meur traîne son regard hagard à l’horizon. Si cela fait aujourd’hui dix ans que l’activité maritime a totalement cessé dans cette petite ville du sud du Finistère, l’ancien chercheur de l’Ifremer à la station de Concarneau n’arrive toujours pas à se faire une raison. Comment, en moins d’un demi-siècle, le monde a-t-il pu laisser mourir l’un de ses plus importants fournisseurs d’oxygène, d’énergie, de nourriture ? Comment a-t-il pu ne pas réagir aux multiples sonnettes d’alarme tirées par autant de scientifiques, à commencer par ceux du Giec qui, dès 2019, avaient publié leur premier rapport spécial sur l’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique ?
Quand il passe aux abords de l’ancienne criée, devant laquelle le panneau « Premier port de pêche artisanale de France » ne tient plus qu’à un clou rouillé, Tangi Le Meur a déjà le cœur serré. Ni Le Guilvinec ni aucune autre halle à marée, où qu’elle ait été située sur la carte du monde, ne peut aujourd’hui se targuer d’une production responsable. D’une production quelconque d’ailleurs. Car l’océan n’est plus. « Enfin, se reprend-il dans ses pensées, l’océan existe toujours, il est même plus présent que jamais. Disons qu’il a radicalement changé. » Touchée par la puissante montée des eaux, comme nombre d’autres communautés littorales, notamment bretonnes ou ligériennes, Le Guilvinec devrait ainsi bientôt disparaître.