Et si… les océans mouraient d’asphyxie

7 octobre 2025  | Par Anne-Laure GROSMOLARD
L'actuariel // Environnement // Et si… les océans mouraient d’asphyxie

– Décembre 2053 –

Victimes du réchauffement climatique et des activités anthropiques, les mers et océans ont vu leur température augmenter au même rythme qu’ils étaient en proie à une pollution exponentielle. Résultat : ils sont aujourd’hui totalement asphyxiés. Amputée d’un de ses deux poumons et malade de l’autre, la population tente de survivre.

Le Guilvinec, Finistère, 31 décembre 2053

Alors qu’il longe le quai le long duquel, autrefois, s’abritaient les bateaux du port de pêche du Guilvinec, Tangi Le Meur traîne son regard hagard à l’horizon. Si cela fait aujourd’hui dix ans que l’activité maritime a totalement cessé dans cette petite ville du sud du Finistère, l’ancien chercheur de l’Ifremer à la station de Concarneau n’arrive toujours pas à se faire une raison. Comment, en moins d’un demi-siècle, le monde a-t-il pu laisser mourir l’un de ses plus importants fournisseurs d’oxygène, d’énergie, de nourriture ? Comment a-t-il pu ne pas réagir aux multiples sonnettes d’alarme tirées par autant de scientifiques, à commencer par ceux du Giec qui, dès 2019, avaient publié leur premier rapport spécial sur l’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique ?

Quand il passe aux abords de l’ancienne criée, devant laquelle le panneau « Premier port de pêche artisanale de France » ne tient plus qu’à un clou rouillé, Tangi Le Meur a déjà le cœur serré. Ni Le Guilvinec ni aucune autre halle à marée, où qu’elle ait été située sur la carte du monde, ne peut aujourd’hui se targuer d’une production responsable. D’une production quelconque d’ailleurs. Car l’océan n’est plus. « Enfin, se reprend-il dans ses pensées, l’océan existe toujours, il est même plus présent que jamais. Disons qu’il a radicalement changé. » Touchée par la puissante montée des eaux, comme nombre d’autres communautés littorales, notamment bretonnes ou ligériennes, Le Guilvinec devrait ainsi bientôt disparaître.

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Note

Poumon de la planète. L’océan produit 50 % de nos besoins en oxygène, absorbe un quart des émissions de CO2 et capture 90 % de la chaleur supplémentaire générée par ces émissions.

Doublement. Depuis 2005, le réchauffement des océans, qui n’a cessé de progresser depuis les années 1960, s’accélère. Il est ainsi passé de 0,58 watt par mètre carré (W/m2) à 1,05 W/m2.
L’élévation du niveau de la mer a elle aussi doublé. Après une hausse de 15 cm au cours
du XXe siècle, ce niveau progresse désormais de 3,6 mm par an. Si le réchauffement est limité en dessous de 2 °C, la hausse atteindra de 30 à 60 cm d’ici 2100. Sinon, elle sera de 60 à 110 cm.

Acidification.
Le pH de l’océan de surface, de 8,1, pourrait passer à 7,8 en 2100. Cette acidification des océans, due à l’augmentation du CO2, entraîne de nombreux risques pour plusieurs espèces marines, comme les coraux, le plancton, les coquillages ou les crustacés.

Source : ONU, fondation Tara Océan, institut Copernicus, Giec.

Cnidaire.

Au même titre que la méduse ou l’anémone, le corail est un cnidaire. S’ils n’occupent que 0,2 % des fonds marins, les coraux abritent, selon les scientifiques, entre 25 % et 30 % de la biodiversité marine. En outre, véritable barrière naturelle, ils absorbent l’énergie houlomotrice et participent à la réduction de l’érosion côtière. Près de 500 millions de personnes dépendent directement des récifs coralliens (alimentation, protection des côtes, emploi).