Dix-sept ans après la chute de Lehman Brothers, les appels à un assouplissement du cadre prudentiel bancaire se multiplient. Dans l’Amérique de Donald Trump, on parle sans tabou de dérégulation. En Europe, ce sont des travaux de « simplification » qui sont lancés, avec la préservation de la stabilité financière en ligne de mire. Un exercice d’équilibriste.
Septembre 2008. Le système bancaire mondial, confronté à la faillite de Lehman Brothers, découvre avec effarement son insondable fragilité. S’ouvre alors une phase de durcissement réglementaire sans précédent, avec un mot d’ordre : plus jamais cela. Dix-sept ans plus tard, ce cadre prudentiel n’a pas atteint l’âge de la majorité, mais est déjà la proie de multiples attaques. Pourtant pionnière dans la mise en œuvre de l’accord du Comité de Bâle de décembre 2010 (1) – la première mouture de Bâle 3 –, l’Union européenne (UE) a proposé le 17 juin un allègement des contraintes portant sur la titrisation, à savoir l’instrument qui a servi à disséminer la crise des subprimes américaine à travers le monde. Cinq jours auparavant, elle avait décidé de reporter d’un an supplémentaire l’entrée en vigueur du dernier pan manquant de Bâle 3, celui encadrant les risques de marché. La revue fondamentale du portefeuille de négociation (2) (FRTB, en anglais) – un texte majeur pour les grandes banques d’investissement – n’est plus attendue que pour 2027, soit vingt ans tout juste après le début de la crise des subprimes. À moins qu’elle ne soit tout simplement abandonnée. « Nous sommes engagés dans une course vers le bas qui ne semble pas vouloir s’arrêter », se désespère Thierry Philipponnat, un ancien banquier qui a participé à l’élaboration du cadre prudentiel européen post-crise à travers l’ONG Finance Watch qu’il a fondée en 2011 et vient de quitter.
L’UE est loin d’être une exception en la matière. Ses récentes initiatives s’inscrivent dans un mouvement d’assouplissement réglementaire – d’aucuns parlent même de « dérégulation » – quasi généralisé.